Des jeunes communistes à l’EHESS en passant par l’OCDE

Peu de parcours peuvent témoigner d’une aussi grande hétérogénéité. Cornelius Castoriadis adhères aux jeunesse communistes en 1937 et plus particulièrement aux jeunesse trotskystes en 1942.

Son militantisme atteint son apogée avec la création de son groupe Socialisme ou Barbarie en 1949 avant qu’il se consacre à la recherche universitaire en étant directeur de recherche à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) entre 1980 et 1997.

(Socialisme ou barbarie, ouvrage phare de la pensée de Castoriadis)

Alors que la première partie de sa vie est dédiée à une étude précise du socialisme et de sa nécessité, l’après Socialisme ou barbarie marque le peaufinement de sa pensée et sa vision de l’autonomie radicale. Très concrètement, la démocratie directe et l’autonomie radicale sont les deux pilliers sur lesquels Castoriadis s’appuie pour fonder sa philosophie.

 

Les principes de l’autonomie radicale chez Castoriadis

Dans son ouvrage, Serge Latouche nous rappelle les principes de l’autonomie radicale chez Castoriadis. L’ontologie de Cornelius Castoriadis pose les bases de son raisonnement. Il dit « L’être est un chaos, sans fond et sans abîme ».

Dans une société où l’individu ne crée pas lui-même ses institutions, ses normes et son autonomie, les institutions sociales lui fournissent un imaginaire aliénant. Latouche reprend toute la conception de Castoriadis de l’autonomie radicale.

L’inspiration de Castoriadis apparaît avant tout spinoziste. Dans son Ethique, Spinoza nous dit que la société la plus égalitaire sera celle dans laquelle les désirs de chacun seront exprimés et réalisés avec le plus d’équité. Rousseau, Marx puis les intellectuels marxistes du XXème siècle y voient une invitation à la démocratie directe, idée phare de Castoriadis qui se conjuge avec l’autonomie radicale.

L’intellectuel français se nourrit de deux imaginaires principaux où l’autonomie et la démocratie directe se seraient réalisés. Il évoque le cas de la Grèce antique (Athènes notamment) puis du siècle des Lumières. Il s’agit alors de « briser la clôture » des institutions qui dominent nos imaginaires afin de laisser de développer nos désirs et nos propres imaginaires.

 

La mise en oeuvre de la philosophie de Castoriadis

Chez Castoriadis, la pensée et l’action de font qu’un. Penser l’aliénation, c’est déjà penser à la future libération de cette aliénation.

Pour lui, ce sont à la fois la croyance en la croissance infinie et la croyance dans la rationalité poussée à bout qu’il faut abolir en créant de nouveaux imaginaires. La société de consommation et les technologies endormissent l’homme dans ce que Pasolini appelait le « fascisme doux » et l’empêchent de se révolter.

(La Rage de Pasolini, exemple de dénonciation de la société de consommation comme nouveau fascisme « doux ». Voir l’article dédié à ce livre sur Le Gauchiste)

Dénoncer l’agression publicitaire est surement le point de départ du décloisement mental. Ensuite, il faut réeduquer les masses pour créer de nouveaux imaginaires et que ces nouveaux imaginaires viennent de ces masses. Tel est le propos de Castoriadis qui a beaucoup influencé les actuels Casseurs de Pub ou autres décroissants.

Contrairement à avant, il n’y a plus l’idée d’une classe sociale qui doit faire la révolution. Désormais, nous devons tous faire la révolution en abandonnant la vision téléologique de l’histoire vue sous le prisme de la modernité et du progrès technique comme chez Hegel et Marx.

Pour aller plus loin

Serge Latouche – Cornélius Castoriadis et l’autonomie radicale

France Culture – Cornelius Castoriadis – titan dans le labyrinthe (1992-1997)