L’édition en ce début d’année 2020 de ces quelques textes d’Emma Goldman chez Payot/Rivages est l’occasion de redécouvrir des écrits féministes de l’anarchiste russe. Au programme : la liberté des femmes.
(Le massacre de Haymarket Square le 4 mai 1886 a profondément marqué Emma Goldman et l’a poussée à se révolter)
C’est la seule cause féministe qui intéresse Emma Goldman et c’est sur cela que se penche cet article avec les deux textes La tragédie de l’émancipation féminine et Le droit de vote des femmes.
Les deux essais se complètent. Le premier vise à ce que les femmes s’émancipent des idéologies dominantes de l’émancipation et trouvent la leur. Le deuxième texte est une application du premier en ce qui concerne le droit de vote.
La tragédie de l’émancipation féminine
Dès 1906 et l’époque des suffragettes, l’autrice américaine voit plus loin. L’égalité juridique n’est pas l’égalité réelle. L’égalité réelle nécessite une révolution permanente. Elle soutient cette idée dans un texte qui vient de la revue libertaire fondée par Emma Goldman elle-même Mother Earth (1906).
(Une de la revue Mother Earth)
Le but n’est pas un simple égalitarisme dans une société sombre mais plutôt de pouvoir vivre « une vie plus riche et plus intense ». La satisfaction de la libération des femmes ne relève pas seulement d’un aspect égalitariste quantifié mais d’une liberté totale qualitative.
Le féminisme d’Emma Goldman est radical. Pour elle, les luttes à l’intérieur du système sont insuffisantes car elles oublient un point essentiel : la liberté des femmes à vivre comme elles le souhaitent et à aimer comme elles veulent. Il faut donc détruire toutes les anciennes valeurs et réfléchir à de nouvelles valeurs véritablement libératrices.
Le droit de vote des femmes
Dans ce texte extrait de Anarchism and Other Essays (1910), Goldman estime que le droit de vote n’est pas la clé de voûte de la libération des femmes. C’est avant tout de leur capacité à se libérer elles-mêmes que la libération des femmes dépend. Car les systèmes de dominations patriarcaux sont le fruit de siècles et ne peuvent se résoudre avec de simples bulletins dans les urnes.
(Anarchisme et autres essais de 1910 d’Emma Goldman)
La particularité de Goldman est d’être une militante libertaire. Dès lors, aucune idole représentative ou aucune institution (mariage, Etat, enfants, travail) ne peut libérer les femmes. Il faut pour elle, repenser toute la structure sociale.
La dernière particularité de Goldman est la place qu’elle donne à l’homme dans cette restructuration des hiérarchies. Son optimisme est de croire qu’une société pleinement libertaire peut permettre de remettre en cause tous les privilèges de classe et tous les privilèges de genre. Son actualité est bien totale.
(Les éditions Payot/Rivages ont réédité ces deux textes d’Emma Goldman en mars 2020)
Dans une époque davantage intéressée par la lutte des classes et par l’émancipation des travailleurs, Emma Goldman, dès le XIXème siècle et les révolutions russes s’intéresse à la libération des femmes au sein de la libération des prolétaires. Pour elle, seules les décisions de chacun dans un système économique et social décidé par chacun peut permettre la libération de tous. Elle s’inscrit parfaitement dans une tradition libertaire. Son féminisme libertaire fut bien en avance dans l’histoire.
Gauchistement votre,
Le Gauchiste