Grande figure du mouvement ouvrier français, Simone Weil est considérée par beaucoup comme l’une des plus grandes intellectuelles du XXème siècle. L’originalité de son parcours réside dans son expérience en tant qu’ouvrière à l’usine qui a duré plusieurs mois pour comprendre au mieux les revendications ouvrières. 

Weil se distingue également avec ses écrits et notamment son activité journalistique pendant les années 1930. Elle se fond dans la masse du mouvement ouvrier en ouvrant la porte à un genre nouveau qui sera théorisé plus tard : l’observation participante (discipline qui consiste à décrire une expérience faite avec les personnes concernées).

(Exemple de journal de Simone Weil)

 

Il reste qu’il est impossible de faire une biographie exhaustive de Weil tant sa vie a été riche alors même qu’elle décède à 34 ans.

 

 

La singularité de la démarche : l’observation participante entre 1934 et 1936

Diplômée de l’Ecole normale supérieure (ENS) en 1930, Simone Weil part enseigner au lycée du Puy-en-Velay. C’est au cours de l’hiver 1932-1933 qu’elle s’engage comme syndicaliste et soutient les ouvriers et leurs revendications.

Rapidement, un mythe se crée autour de ses écrits lorsqu’elle prend le surnom de « G. Galois » dans les revues L’Ecole émancipée puis La Révolution prolétarienne de Pierre Monatte. Elle boucle sa principale oeuvre en 1934 Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale. Elle projette de se lancer dans son projet de travailler en usine.

Dès lors, elle commence à travailler en tant qu’ouvrier fraiseur. Elle tient un journal « Journal d’usine » où elle écrit chaque jour la vie à l’usine.  Ce journal est fait de deux parties, la première « La vie et la grève des métallos » puis la seconde partie sur les grèves et occupations beaucoup plus connue.

(Contrinutions de Simone Weil à La Révolution prolétarienne)

Les récits sont poignants et témoignent pour la première fois d’un(e) intellctuel(le) qui vit les choses de l’intérieur « Des scènes de paie. On défile comme un troupeau de vent le guichet, sous l’oeil des contre-maîtres. On ne sait pas ce qu’on touchera : il y aurait toujours à faire des calculs tellement compliqués que personne ne s’en sort, et il y a souvent de l’arbitraire. Impossible de se défendre du sentiment que ce peu d’argent qu’on vous passe à travers le guichet est une aumône. »

Les écrits de Weil sont concomitants avec l’arrivée au pouvoir du Front Populaire et les grandes grèves de 1936. Elle analyse le surgissement des grèves de 36 comme point de non-retour pour la classe ouvrière. Après avoir été méprisée en 1919-1920, elle subit la crise de 1929 en acceptant les demandes patronales. L’arrivée du pouvoir du Front Populaire en 1936 donne le sentiment aux ouvriers qu’ils peuvent désormais se faire entendre et faire grève avec efficacité. De là, nait une nouvelle vision de la grève.

 

 

Syndicalisme révolutionnaire, condition de la classe ouvrière et émancipation

 

Alors que les grèves avaient été malheureuses, l’année 1936 change la donne. En allant dans les usines, Weil se rend compte d’une nouvelle donnée fondamentale : l’unité, l’espoir et la joie traversent le camp de la classe ouvrière. Ce changement permet alors de réaliser de nouvelles expériences collectives des dominés pour rompre leur lien de domination.

 

(Image des grèves de 1936)

 

C’est le début des occupations d’usine et du syndicalisme révolutionnaire. Weil côtoie beaucoup de militants et de théoriciens de cette doctrine (Ex : Edouard Berth) qui est une anti-doctrine. Pour elle, le syndicalisme révolutionnaire n’est pas la « simple administration des intérêts ouvriers » mais plutôt un « mouvement populaire, aussi mystérieux dans son origine, aussi inimitable qu’une chanson populaire ; il  une tradition, un esprit, un idéal; il a ses héros, ses martyrs, ses saints. Il ne correspond ni à une doctrine, ni à une tactique, ni à une opportunité quelconque, mais aux aspirations et aux besoins du peuple à une certaine période de l’histoire. »

 

(Reflexions sur la violence, ouvrage théorique de Georges Sorel, grand penseur du syndicalisme révolutionnaire)

 

C’est l’occasion pout Weil de se rendre compte que l’amélioration de la vie des ouvriers ne peut être que déterminée par l’action du haut comme le Parti communiste français et les grands syndicats (CGT). Par plusieurs moments, le parti et les syndicats ont plié face aux patrons et seules les actions syndicales d’occupation et de sabotage ont fait plier le patronat.

Seule une action menée dès son origine par les dominés peut leur apporter joie, unité et ténacité. Cette considération l’amène à un pessimisme certain « Je ne veux aucune responsabilité, si mince soit-elle, même indirecte, parce que je suis sûre que tout le sang qui sera versé sera versé en vain et qu’on est battu d’avance. »

(La classe ouvrière va au paradis d’Elio Petri, exemple de film où la classe ouvrière ne parvient pas à s’émanciper)

 

 

Gardons en mémoire l’originalité et l’honnêteté intellectuelle de Simone Weil et la réflexion qu’elle nous transmet sur les conditions de notre domination et les moyens d’y échapper.

 

(Recueil de textes de Simone Weil)

 

Gauchistement votre,

 

Le Gauchiste