Aujourd’hui, nous sommes à bord d’un Vaisseau Spatial qui va vers 3 direction : Mondialisation, Occidentalisation et développement.

 

Après la chute de l’URSS, le monde s’unifie économiquement mais se disloque culturellement. La Multiplicité de crises s’englobe dans la crise de l’humanité. Vers quel progrès allons-nous ? La fin du totalitarisme a porté les fanatismes religieux et le capitalisme financier.

 

Edgar Morin est connu pour avoir introduit la « Pensée complexe » dans son ouvrage La Méthode, qui consiste notamment à réunir les différents domaines entre eux pour faire émerger une nouvelle connaissance.

 

 

(Premier Tome de La Méthode d’Edgar Morin)

 

 

L’auteur français a été beaucoup influencé par l’esprit universalisme français (Montesquieu, Voltaire, Hugo). Après ses voyages en Amérique latine, il ancre son universalisme à travers une doctrine qu’il exprime avec ces mots « L’unité de la multiplicité et de la diversité humaines : l’unité humaine engendre la diversité humaine et la diversité humaine entretient l’unité humaine. »

 

(Montesquieu a beaucoup influencé la pensée universaliste)

 

 

Selon Morin, nous sommes toujours à l’ « âge de fer planétaire » et dans la « préhistoire de l’esprit humain ». 

 

 

 

Le constat et le besoin de réformes

Les constats et problématiques contemporains

 

Pour l’intellectuel français, l’aveuglement occidental se fait pour deux raisons principales (On est aveugles par rapport à nos connaissances car on classe tout et notre connaissance très rationnelle et occidentale-centré nous donne l’illusion qu’on possède l’universel). Le grand pari, c’est celui de la connaissance.

 

Une crise de l’unification mondiale s’est propagée. On ne croit plus au progrès universel (qu’il soit de l’ouest ou bien de l’est) avec notamment le risque écologique et nucléaire. Le nerf de la guerre est la crise financière qui provoque toutes les autres crises car la finance est déconnectée des réalités productives.

 

Le développement pose problème. Il a apporté beaucoup de bonnes choses (baisse de la pauvreté, apparition de la classe moyenne, infrastructures) mais désormais, on fonce vers un désastre écologique avec les classes moyennes et aisés consuméristes. 

 

(Pierre Rabhi, un penseur proche des idées écologistes d’Edgar Morin)

 

Le développement amène chaque individu à un rôle précis, délaissant la globalité des rôles qu’il doit avoir pour vivre en harmonie avec les autres. Pour Edgar Morin : « l’idée du développement est une idée sous-développée. Il donne le modèle occidental comme archétype universel pour la planète. Il suppose que les sociétés occidentales constituent la finalité de l’histoire humaine. »

 

 

 

La méthode d’Edgar Morin dans le cadre de la pensée complexe

 

Ainsi, de la globalisation naît la conscience de notre destin commun et la nécessité de nous sauver. Pour Morin « Le probable est la désintégration, l’improbable est la métamorphose. » Métamorphose est mieux que la Révolution car la métamorphose garde des bases sur lesquelles il faut s’appuyer.

 

Pour créer une métamorphose, nous avons besoin de créer une nouvelle marginalité (comme les explorateurs au XVIème siècle, le socialisme au XIXème, etc…). Plusieurs voies, par la base, se développent dans le monde. Il faudrait se faire se croiser ces voies pour créer La voie.

 

(Castoriadis, intellectuel français qui a beaucoup influencé Edgar Morin)

 

Pour créer cette « Voie », il faut aller au-delà des simples oppositions mondialisation / démondialisation ou développement / enveloppement et prendre ce qu’il y a de bon dans chaque chose.

 

Il ne faut pas seulement dénoncer, il faut aussi énoncer. La métamorphose est une nouvelle origine. Il y a beaucoup d’initiatives personnelles de toutes parts. Il faut savoir les lier entre elles pour créer La Voie. C’est l’objet de ce livre.

 

 

 

Les premières réformes profondes

Réforme de la pensée

 

La toute première crise, à l’origine des autres, c’est la crise de la connaissance. Nous sommes submergés d’informations. Nous nous spécialisons dans certains domaines, ce qui nous éloigne du tissu de la complexité. Pour le philosophe « La découverte des limites de la connaissance a été un très grand progrès de la connaissance. » 

 

En découle une vision non linéaire des causes / conséquences (avec un manque de liberté dans la vision spinoziste), un manichéisme et binarisme parfois extrême. La réforme de la connaissance appelle la réforme de la pensée. La réforme de la pensée appelle une pensée de la relance qui puisse relier les connaissances entre elles. 

 

Pour résumer « Nous ne sommes pas arrivés à la société de la connaissance, nous sommes arrivés à la sociétés des connaissances séparées. » De ce constat découle le besoin de lier les connaissances entre elles.

 

De nouveaux domaines (comme l’écologie) n’ont de sens que dans un système global, globalisant, faisant entrer d’autres notions réflexives. La connaissance doit savoir contextualiser, globaliser, multidimensionnaliser, c’est-à-dire être complexe. 

 

 

 

Réforme de l’éducation

 

Pour créer une nouvelle connaissance et une nouvelle réforme de la pensée, il faut réformer l’éducation et amener les jeunes à réfléchir, à l’épistémologie, à la critique. Morin se réfère à l’Emile de Rousseau « Je veux lui apprendre à vivre. », c’est-à-dire affronter des problèmes personnels, sa relation au monde, etc… 

 

En reliant les connaissances entre elles, le but est que chaque élève comprenne pourquoi il apprend « Qu’est-ce que la connaissance pertinente ? Qu’est-ce que l’homme ? Qu’est-ce que la vie ? La société ? Le monde. »

 

1ère chose : Enseigner l’épistémologie, autrement dit la connaissance de la connaissance (connaissance de l’humain, de l’ère planétaire, la compréhension humaines, les incertitudes). Comme disait Descartes, le propre de l’erreur est qu’elle ne se connait pas elle-même. Car tout savoir peut se tromper (La vue, L’ouïe, une lecture, un tableau, absolument tout). Il faut donc apprendre qu’on peut se tromper. Dès lors, on enseignerait ce qu’est une connaissance pertinente. Une connaissance est pertinente si elle sait se placer dans on contexte.

 

2ème chose : Ensemble de propositions résumées dans Les Septs Savoir nécessaire à l’éducation du futur (comprendre qu’on est à la fois égocentrique tout en étant altruiste, qu’on appartient à l’ère planétaire, comprendre les autres, affronter les incertitudes, développer une triple éthique de la personne, civique et du genre humain)

 

(Couverture des Sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur d’Edgar Morin)

 

 

Changer de paradigme : quelle politique de l’humanité ?

 

Cette réforme de la connaissance, de la pensée et de l’éducation doit nous pousser à réformer la politique. La politique oscille toujours entre « Realpolitik » et « ideal politik ». Afin de mettre en place une politique, il faut créer une nouvelle pensée politique (comme Tocqueville sur la démocratie) car un gouvernement est toujours inspiré d’une pensée politique.

 

(Otto Von Bismarck, fondateur de la « Real Politik » dans la seconde moitié du XIXème siècle)

 

L’action politique sera la conclusion de toute la construction d’une nouvelle pensée et obéira à une double orientation : celle de la politique de l’humanité et celle d’une politique de la civilisation.

 

La Politique de l’humanité porte en elle le concept de « Terre-patrie » avec la conscience de notre destin commun. Les anciens internationalistes oubliaient de respecter les singularités. Le nouvel universalisme respectera ces singularités.

 

Cette Politique de l’humanité prendrait ce qu’il y a de bon chez l’Occident (Droits de l’homme, humanisme) pour l’associer à d’autres cultures (rapport avec la Nature, croyances). Elle s’appliquerait selon les contextes de chaque pays avec un service civique des jeunes de pays développés. Elle serait une symbiose entre ce qu’il y a de meilleur en Occident et ce qu’il y a de meilleur ailleurs. Cette symbiose serait la nouvelle civilisation.

 

Pour ce qui est de la Politique de la civilisation, il faut comprendre les choses positives et les choses négatives de la civilisation occidentale. Quel idéal-type de l’Occident ?

 

Pour Freud, toute civilisation crée sa propre destruction. Et l’Occident ? Elle produit beaucoup mais amène le désastre écologique, elle automatise tout et détruit le rapport humain, elle développe l’Etat tout en créant la bureaucratie, elle étend le marché tout en rendant tout marchant (santé, éducation). L’individualisation a crée une société sans solidarité d’autant plus que l’Etat se délite aussi. Mal-être général entre le corps et l’esprit qui ne sont plus liés. 

 

(Freud, auteur du Malaise dans la civilisation)

 

Les impératifs de la politique de civilisation sont alors de solidariser, ressourcer, convivialiser et moraliser.

 

Plus précisément, Edgar Morin nous donne un ensemble de réformes possibles dans les domaines :

 

Démocratique (amplifier la démocratie)

 

Démographique (Limiter la population et maitriser les flux migratoires

 

Ecologique (écologistes à tous les niveaux en réduisant notre empreinte écologique jusqu’à atteindre le zéro), sur  l’eau (faire qu’elle soit un bien commun)

 

Economique (abandon de l’idée de croissance, développement de l’économie solidaire, verte et plurielle, démarchandisation de biens communs, réformer l’entreprise, maintenir les services publics, développement du local)

 

Sur les inégalités (supprimer dettes des pays pauvres, fournir gratuitement le minimum aux pays pauvres, créer un « Etat d’investissement social » avec service civique obligatoire pour créer de la solidarité)

 

Sur la bureaucratie (Triple Problème dans le organisations internationales et nationales que sont la spécialisation, la hiérarchie et la centralisation. L’Excès de hiérarchie enlève toute prise d’initiative pendant que l’excès de spécialisation isole individu sans l’inciter à utiliser son intelligence car il ne voit pas les choses dans leur globalité. La bureaucratie génère l’irresponsabilité, l’inertie et le désintérêt. La réforme de la bureaucratie n’a de sens que si on restaure la responsabilité et la solidarité chez chaque individu).

 

 

 

Les réformes concrètes qui en découlent 

 

Suite à ces premières réformes initiatrices, découlent un certain nombre de réformes plus précises dans notre vie de tous les jours. Le penseur français développe les réformes de sociétés puis les réformes de vie.

 

Les réformes de société

 

Sur l’école (la réforme porterait sur le fait de rendre la vie de chacun poétique. Il y aurait l’enseignement de la civilisation occidentale, partout là où elle s’est installée ainsi que les civilisations traditionnelles en prenant soin de prendre avant tout le meilleur de chacune des civilisations étudiées. Pour Morin : « Seuls des esprits réformés pourraient reformer le système éducatif, mais seul un système éducatif réformé pourrait former des esprits réformés. » Tout ça se fera avec des va-et-viens. Il faut apprendre des expériences Montessori, Freinet et autres).

 

(Maria Montessori, fondatrice de l’école Montessori)

 

Sur la santé (La médecine occidentale domine. Le problème est que le médecin voit la personne comme un « patient ». Nous traitons les problèmes sans voir la globalité. Avant, le médecin de campagne était aussi psychologue. Désormais, on rationalise tout en oubliant que beaucoup de maladies viennent de la psyché. Il faudrait intégrer la dimension humaine et la pensée complexe dans les études de médecine. L’industrie pharmaceutique serait à critiquer également avec les lobbies)

 

Sur la ville (Les espaces sont surchargés et il y a trop d’inégalités entre les quartiers. Il faudrait une gouvernance des villes ainsi que des espaces plus égalitaires, une meilleure liaison villes / campagnes et une humanisation des ville avec le développement d’espaces verts)

 

Sur l’agriculture et la campagne (Il y a trop d’agriculture intensive et une trop grande consommation d’eau. Il faudrait réguler le marché et développer les initiatives locales pour autonomiser les nations. Globalement, il faut rendre la terre aux paysans.

 

Sur l’alimentation (Il faudrait créer des normes alimentaires, équilibrer la consommation en diminuant la consommation de viande notamment)

 

Sur la consommation (Il faut sortir du consumérisme et développer les initiatives sociales et écologiques avec les AMAP, petits producteurs bio)

 

Sur le travail (Il faut humaine le travail au niveau mondial avec le Bureau International du travail tout en réduisant la bureaucratie et automatisant les tâches difficiles au sein de l’entreprise.

 

Les réformes de vie

 

 

Sur la réforme de vie (Dans une société toujours plus intéressée par l’argent et la course à la réussite personnelle, la réforme de vie doit pousser l’homme à aller de nouveau vers la spiritualité avec une aspiration au bien-être (où la qualité prime sur la quantité et où l’être prime sur l’avoir). Edgar Morin propose de vivre à la fois en autonomie et en communauté tout en délaissant le couple Excitation / Dépression pour le remplacer par la Sérénité / Intensité. Le problème de cette réforme est qu’elle est avant tout intérieure. Aucune institution ne peut faire en sorte qu’elle apparaisse chez les individus. La réforme de vie, c’est avant tout une réforme personnelle d’auto-regénération).

 

Sur la réforme morale (La morale pose problème car la religion a amené des erreurs et l’humanisme laïc a des carences. Comment créer une nouvelle morale ? Il faudrait une Ethique individuelle avec l’auto-critique, un éthique civique pour jouir de ses droits et accepter ses devoirs et une éthique du genre humain pour trouver du sens au niveau planétaire)

 

Sur la famille (Le problème de la famille est le manque d’expression de l’amour, peu importe la forme de la famille. Peu importe les situations, il faudra savoir donner de l’amour en toutes circonstances)

 

 

Sur la condition féminine (Le patriarcat est en core présent. Dans les sociétés archaïques, il y avait des complémentarités entre les hommes et les femmes. Marx et Engels voyaient certaines sociétés archaïques comme les prémices du communisme, aussi bien entre les hommes eux-même qu’entre les hommes et les femmes).

 

(Marx et Engels, intellectuels s’étant penchés sur la situation de la femme)

 

L’adolescence et la vieillesse (Il faudrait mieux traiter les adolescents car ils sont à la fois le maillon faible car ils ont peu insérés dans la société et le maillon fort car ils ont beaucoup d’énergie. En ce qui concerne la vieillesse, il faudrait mieux traiter les personnes âgées et leur donner davantage de personnel avec un meilleur lien entre les générations).

 

 

Sur la mort (la fin de la religiosité en Occident fait qu’on a peur et qu’on souffre face à la mort. Il faudrait retrouver une poésie de la mort. De même, le retour à un sens, à un système de valeurs plus sain et une réflexion sur soi-même peut nous éloigner de la peur de la mort, en évitant de passer du temps devant le simple divertissement).

 

 

Conclusion

 

La première des réformes est la réforme épistémologique. En réformant la pensée, on peut réformer tout le reste. Les réformes n’ont de sens que si elle se combinent entre elles. Simplement, il ne faut pas non plus être trop utopiste, on ne pourra atteindre le meilleur des mondes. On peut cependant espérer un monde meilleur.

 

Même si Edgar Morin est plutôt pessimiste, il nous dévoile à la fin de son ouvrage ses cinq principes d’espérance (Le surgissement de l’inattendu, Les vertus génératrices des individus, Les vertus de la crise, Les vertus du péril, L’aspiration de l’humanité à l’harmonie).

 

Au delà des constats qui sont faits par la plupart des observateurs, il faut avant tout retenir la méthode proposée par l’intellectuel français, c’est-à-dire mettre l’accent d’abord sur la réforme épistémologique de la connaissance avant de s’attaquer au reste.

 

 

(La Voie d’Edgar Morin)

 

Rappelons-nous La Méthode proposée par Edgar Morin en la mettant en lumière par rapport aux théories gauchistes élaborées dès les XIXème et XXème siècle. Elles pourront s’avérer utiles pour notre avenir.

 

Gauchistement votre,

 

Le Gauchiste